Voici comment les aérosols impactent les nuages et le climat !
Une étude récente met en évidence que les aérosols, ces minuscules particules en suspension dans l'air, se révèlent être des acteurs clés dans la formation des nuages et dans la prédiction du climat. La découverte est inédite.
La compréhension des nuages demeure incomplète dans le domaine de la climatologie, et constitue ainsi la principale source d'incertitude dans les prévisions des changements climatiques. Une analyse exhaustive des phénomènes météorologiques à grande échelle ainsi que des processus microscopiques est nécessaire pour cerner ce sujet.
Un petit rappel sur la formation des nuages
De manière plus simple, les nuages se forment lorsque l'air chaud et humide s’élève, se refroidit et atteint un point de saturation, c’est-à-dire, un point où il ne peut plus contenir toute sa vapeur d'eau. Sous l’effet de variations de température, de pression, cette vapeur d'eau se condense alors autour de minuscules particules en suspension dans l'air que l’on appelle « noyau de condensation ».
Ce processus aboutit à des formations visibles dans le ciel, avec différentes formes et hauteurs selon les conditions atmosphériques locales.
La nouvelle étude publiée dans Geophysical Research Letters, a mis en lumière l'importance de ces toutes petites particules qu’on peut également désigner par "aérosols", dans la formation des nuages, ainsi que leur influence sur les tendances climatiques futures. Ces aérosols peuvent être d'origine naturelle (pollens ou autres aérosols organiques, sels marins,…) ou anthropique (carbone suie…).
Des noyaux de condensation de plus en plus petits !
Reprenons. Pour qu'un nuage se forme, deux conditions principales doivent donc être remplies :
- l'air doit être saturé en eau, ce qui signifie qu'il contient plus d'eau qu'il ne peut en contenir normalement,
- il doit y avoir une petite particule, appelée noyau de condensation, sur laquelle l'eau peut se condenser.
Justement, les chercheurs se sont concentrés sur les "noyaux de condensation" dans les stratocumulus californiens, des nuages bas étalés horizontalement au-dessus des océans.
Les mesures de nuages stratocumulus marins effectuées en 2014 par des scientifiques du Nevada ont servi de base à l'étude. Ces mesures révèlent une relation entre la quantité d’aérosols et la sursaturation d'eau dans l'atmosphère. Ces mesures, combinées aux mesures satellitaires mondiales de l'instrument MODIS ont permis de calculer la quantité de gouttelettes dans les nuages, à partir de laquelle une carte mondiale de sursaturation a été établie.
La surprise réside dans le fait que la sursaturation est généralement plus élevée que ce qui était supposé. En d’autres termes, la quantité d'eau dans l'air était plus importante que prévu, ce qui signifie que des particules plus petites pouvaient servir de noyaux de condensation.
En effet, les chercheurs ont constaté que des particules d'aérosol extrêmement petites, mesurant seulement entre 25 et 30 nanomètres, peuvent influencer la formation des nuages, remettant ainsi en question les recherches climatiques antérieures qui supposaient qu'une taille minimale d'aérosol plus grande était nécessaire.
Pour mieux comprendre la sursaturation, passons l'éponge !
Imaginons que l'air soit comme une éponge et la vapeur d'eau comme l'eau que l'éponge peut absorber. Lorsque l'éponge est presque saturée, elle peut encore absorber un peu plus d'eau. Cependant, il y a un point où l'éponge est tellement pleine qu'elle ne peut plus absorber d'eau supplémentaire. C'est comme lorsque l'air est sursaturé en vapeur d'eau, il contient déjà beaucoup plus de vapeur d'eau que ce qu'il peut normalement retenir.
À ce stade, le moindre changement de température ou de pression peut entraîner la condensation de l'eau en excès, tout comme l'éponge déborde lorsque vous appuyez dessus. Même si techniquement, l'air ne devrait pas pouvoir contenir plus de vapeur d'eau, il le fait quand même, jusqu'à ce qu'il atteigne un point où la condensation se produit.
Si, traditionnellement, on pensait que les noyaux de condensation devaient être assez gros, environ 60 nanomètres ou plus, pour que l'eau se condense autour d'eux, cette nouvelle recherche montre qu'en réalité, des particules beaucoup plus petites peuvent faire l'affaire.
Une découverte qui chamboule tout !
Cette découverte a des implications importantes dans la modélisation du climat et la prédiction des changements futurs. En comprenant mieux le rôle des particules ultrafines dans la formation des nuages, nous pouvons améliorer nos prévisions climatiques et mieux anticiper les défis à venir.
Référence : Henrik Svensmark et al, Supersaturation and Critical Size of Cloud Condensation Nuclei in Marine Stratus Clouds, Geophysical Research Letters (2024). DOI: 10.1029/2024GL108140