Violences et canicules : une corrélation inquiétante ?

De plus en plus d'études montrent un lien direct entre chaleur extrême et augmentation des violences, exacerbée par les inégalités sociales. En savoir plus sur les chiffres et les causes.

Les canicules agissent comme un catalyseur des violences, particulièrement dans les zones déjà fragilisées par les inégalités sociales.
Les canicules agissent comme un catalyseur des violences, particulièrement dans les zones déjà fragilisées par les inégalités sociales.

Les conséquences du changement climatique vont bien au-delà des impacts environnementaux immédiats. Les vagues de chaleur, de plus en plus fréquentes et intenses, semblent également jouer un rôle dans l'augmentation des comportements violents. Cette relation entre chaleur extrême et violence mérite une attention particulière pour mieux comprendre et anticiper ces risques.

Relation troublante

Les statistiques sont sans appel. Une étude menée par des chercheurs de l’Université de Washington, a révélé que près de 8 000 fusillades dans 100 grandes villes américaines auraient pu être évitées entre 2015 et 2020 si les températures n'avaient pas été aussi élevées. Cette étude démontre clairement que l’augmentation des températures est corrélée à une montée de la criminalité, notamment des violences armées.

Ces résultats ne sont pas isolés. Une analyse antérieure de 2013, réalisée par des chercheurs des universités de Berkeley et Princeton, a montré qu'une augmentation de 1°C par rapport à la normale saisonnière pouvait entraîner une hausse de 4 % des violences, telles que les violences conjugales, les meurtres et les viols. Les recherches récentes menées à Los Angeles et Séoul confirment également que chaque degré supplémentaire peut exacerber les crimes.

Pourquoi la chaleur exacerbe-t-elle la violence ?

Deux hypothèses principales expliquent cette corrélation. D'une part, des mécanismes physiologiques sont en jeu. L’exposition prolongée à la chaleur entraîne des réactions corporelles stressantes : accélération du rythme cardiaque, augmentation de la pression artérielle et élévation des niveaux de cortisol, l’hormone du stress.

Ces changements biologiques peuvent accroître l’irritabilité, réduire la tolérance à la frustration et altérer les capacités décisionnelles. La difficulté accrue à trouver le sommeil par temps chaud contribue aussi à une détérioration de la santé mentale, favorisant ainsi une agressivité accrue.

D'autre part, les facteurs sociaux jouent un rôle important. Les quartiers défavorisés sont particulièrement touchés. Une étude a montré que la criminalité à Los Angeles augmentait de 2,54 à 4,45 % dans les quartiers les plus pauvres pendant les vagues de chaleur, contre seulement 0,29 à 1,03 % dans les quartiers riches.

Cette situation s’explique par la promiscuité dans des logements souvent mal isolés et dépourvus de climatisation, ainsi que par le manque d’espaces verts pour se rafraîchir, exacerbant les tensions et frustrations.

Enjeux pour les politiques publiques

La relation entre chaleur et violence dévoile des défis majeurs pour les politiques publiques. Bien que la chaleur contribue à une augmentation des violences, elle n'est pas la seule responsable. Les inégalités sociales aggravent considérablement ces tensions.

L'étude du Dr Vivian Lyons et ses collègues met en évidence la nécessité d'une approche intégrée pour atténuer les effets du changement climatique. Il est crucial de mettre en œuvre des politiques qui favorisent une répartition équitable des ressources, améliorent l'isolation des logements et développent des espaces verts dans les quartiers défavorisés. Ces mesures peuvent non seulement atténuer les risques liés aux températures élevées mais aussi réduire les tensions sociales en général.

Les recherches indiquent également que le changement climatique pourrait prolonger les périodes de chaleur extrême et accroître la fréquence des journées extrêmement chaudes, amplifiant ainsi les risques de violence. Pour faire face à ces défis, des stratégies d'adaptation communautaires, comme l'augmentation des espaces verts et l'amélioration des infrastructures urbaines, sont essentielles pour réduire à la fois les impacts de la chaleur et les incidents violents.

Références : Lyons, V. H., Gause, E. L., Spangler, K. R., Wellenius, G. A., & Jay, J. (2022). Analysis of Daily Ambient Temperature and Firearm Violence in 100 US Cities. JAMA Network Open, 5(12), e2247207. https://doi.org/10.1001/jamanetworkopen.2022.47207

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