Réalité ou fiction : les extrêmes de chaleurs vont-ils continuer de doubler tous les dix ans ? Quelles conséquences ?

Les données climatiques montrent que la fréquence des extrêmes de chaleur a doublé chaque décennie depuis la fin des années 70. Pourquoi ces événements climatiques extrêmes se produisent-ils de plus en plus souvent, et quelles sont les implications pour notre avenir ?

Augmentation linéaire mais rapide

Selon une étude récente menée par Robert Vautard, co-président du groupe de travail 1 du GIEC, et ses collègues, publiée dans Environmental Research Letters ce mois de juillet 2024, les extrêmes de chaleur ont augmenté à un rythme quasi-constant, en corrélation directe avec le réchauffement global causé par les activités humaines, telles que la combustion des énergies fossiles et la déforestation.

Les chercheurs ont utilisé des méthodes statistiques rigoureuses, dont la distribution des valeurs extrêmes généralisées (GEV), pour analyser ces phénomènes. En simplifiant, ils ont étudié les températures maximales annuelles et observé leur progression en parallèle avec l’augmentation des températures globales.

Cette progression est linéaire, ce qui signifie que l'augmentation des maxima de température annuelle suit une tendance prévisible, sans saut abrupt ni accélération soudaine.

Cette découverte, rassurante en apparence, n’en reste pas moins alarmante. En effet, l'étude est en train de révéler que ce que nous considérions comme exceptionnel il y a quelques décennies devient de plus en plus courant aujourd'hui.

Si les extrêmes deviennent plus fréquents, les impacts sur nos sociétés et nos écosystèmes pourraient être dévastateurs.

Conséquences pour notre quotidien ?

Les impacts des extrêmes de chaleur ne se limitent pas à l'inconfort personnel. Ils se traduisent par des conséquences graves sur la santé, l’économie et l’environnement.

• Par exemple, la canicule de juin 2021 en Amérique du Nord a établi de nouveaux records de température, dépassant de 4°C à 5°C les précédents records, et a favorisé des incendies dévastateurs. De telles vagues de chaleur, qui étaient autrefois des événements rares (estimées à des périodes de retour de 1000 ans), deviennent maintenant de plus en plus fréquentes.
• La sécheresse et les vagues de chaleur en Russie en 2010 ont réduit la production de blé de près de 25%, entraînant une hausse des prix des denrées alimentaires et une instabilité économique dans de nombreux pays dépendants des importations de blé.

• Les impacts sur la santé humaine sont également préoccupants. Les vagues de chaleur intenses augmentent le risque de maladies liées à la chaleur, comme les coups de chaleur, les déshydratations et les aggravations de conditions chroniques. Les personnes âgées, les enfants et les travailleurs en extérieur sont particulièrement vulnérables. Une étude a montré que les vagues de chaleur en Europe durant l'été 2003 ont causé plus de 70 000 décès supplémentaire.
• L’agriculture souffre également . Les cultures comme le blé, le maïs et le riz, qui sont essentielles à l’alimentation mondiale, voient leur rendement diminuer drastiquement lors de vagues de chaleur prolongées.

Quelles solutions?

Plusieurs solutions peuvent être envisagées.

D’abord, réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre (GES) est crucial. Cela passe par la transition vers des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et des pratiques agricoles durables.

Les systèmes d'alerte précoce et les plans de réponse aux vagues de chaleur peuvent sauver des vies. Les villes peuvent aussi s’adapter en combinant l'utilisation des toits réfléchissants et en augmentant les espaces verts, qui aident à refroidir les températures urbaines. Ces méthodes permettent d'améliorer l’isolation des bâtiments afin de réduire les besoins en climatisation.

La sensibilisation et l’éducation du public jouent un rôle clé. En comprenant les mécanismes et les impacts des vagues de chaleur, chaque individu peut contribuer à des actions collectives pour atténuer le changement climatique.

Il est encore temps d'agir. La science nous fournit des outils et des connaissances pour comprendre et anticiper ces phénomènes. Chaque action compte, que ce soit à l'échelle individuelle, communautaire ou gouvernementale.

Références : Vautard, R., Seneviratne, S. I., & Fischer, E. M. (2024). Heat extremes linearly shift with global warming, with frequency doubling per decade since 1979. Environmental Research Letters, 19(2), 024002. https://doi.org/10.1088/1748-9326/ad63be