Quels impacts rapides et mondiaux peut-on attendre du ralentissement de l'AMOC ?

Une nouvelle étude révèle que le ralentissement de l’AMOC pourrait chambouler notre climat bien plus vite que prévu. Quelles conséquences en perspective ?

La baie de Disko, Groenland : un paysage qui fond.
La baie de Disko, Groenland : un paysage qui fond.

La circulation méridienne de retournement atlantique (AMOC), qui constitue une véritable "courroie de transport globale", redistribue la chaleur à travers l’Atlantique et régule les températures et les précipitations mondiales. Cependant, cette dynamique est plus que jamais en danger.

Depuis les années 1950, l'AMOC a ralenti d’environ 20 %, atteignant son niveau le plus faible depuis un millénaire. Dans une étude récente parue dans la revue Nature Géoscience, les chercheurs estiment que le ralentissement de l’AMOC pourrait se poursuivre et atteindre 33 % de perte par rapport aux niveaux préindustriels si le réchauffement mondial atteint 2 °C.

Cette évolution critique pourrait survenir dès 2040 si le rythme actuel des émissions de gaz à effet de serre (GES) persiste.

Qu'est-ce qui fragilise l'AMOC ?

Depuis 2002, le Groenland a perdu près de 5900 gigatonnes de glace, un chiffre astronomique qui équivaut à couvrir un pays comme le Portugal sous une épaisseur de glace de 8 mètres. Cette eau douce, plus légère que l’eau salée, perturbe le processus naturel de plongée des eaux froides vers les profondeurs de l’océan.

Ce phénomène ralentit le Gulf Stream, une composante essentielle de l’AMOC, et provoque des perturbations majeures qui se propagent rapidement vers le sud de l’Atlantique sous forme d'ondes de Kelvin, des ondes océaniques se déplaçant rapidement le long des côtes ou de l’équateur, et d'ondes de Rossby, des ondes plus lentes qui se déplacent vers l’ouest et influencent les courants marins et le climat sur de grandes échelles.

Des impacts globaux

L’un des aspects les plus frappants du ralentissement de l’AMOC est son impact rapide et global.

Si le Gulf Stream s’affaiblit, des masses d’air arctique pourraient plonger sur le continent européen. Cela entrainerait des hivers plus rudes en Europe, avec des vagues de froid intenses et fréquentes, semblables à celles de l’époque préindustrielle.

Le ralentissement de l’AMOC réduit le transfert de chaleur vers le Nord, ce qui entraîne une accumulation de chaleur dans l’Atlantique Sud et provoque des étés plus chauds et plus humides en Amérique du Sud et en Afrique australe.

La diminution des flux océaniques réduit l’humidité nécessaire pour alimenter les moussons dans l'hémisphère Nord. Cela menace directement les moyens de subsistance de millions de personnes en Asie et en Afrique, qui dépendent de ces précipitations pour l’agriculture.

La fonte accélérée des glaces au Groenland pourrait ajouter jusqu’à 10 cm au niveau global des mers d’ici 2100, exposant les communautés côtières à des risques croissants d’inondations.

L' urgence d'agir

Le ralentissement de l'AMOC est un exemple frappant de l’impact du réchauffement climatique sur les systèmes naturels interconnectés de notre planète. À l’heure où nous dépassons déjà 1,5°C de réchauffement depuis l’ère préindustrielle, l'AMOC nous rappelle que chaque fraction de degré de plus pourrait accélérer les catastrophes climatiques.

Nous avons moins de 20 ans pour inverser la tendance.

Références : Pontes, G.M., Menviel, L. Weakening of the Atlantic Meridional Overturning Circulation driven by subarctic freshening since the mid-twentieth century. Nat. Geosci. (2024). https://doi.org/10.1038/s41561-024-01568-1

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