Que se passe-t-il lorsque le pergélisol fond ?
Le dégel du pergélisol déplace des quantités de carbone préoccupantes dans l'environnement. La combinaison des sources et des puits de carbone dans ce système complexe est importante pour comprendre son impact global sur le climat.
Le pergélisol (sol gelé) est l'un des plus grands puits de carbone au monde, stockant deux fois plus de carbone que l'atmosphère. Cet important réservoir de carbone est "verrouillé" grâce à la basse température du sol. Cependant, la zone de pergélisol se réchauffe partout dans le monde, provoquant la fonte de ce sol gelé. On s'attend à ce que ce processus libère d'énormes quantités de carbone dans l'atmosphère, conduisant potentiellement à une forte rétroaction positive qui pourrait amplifier le réchauffement climatique.
Le chauffage du pergélisol modifie l'environnement du sol, ce qui active la décomposition microbienne de la matière organique. L'activité microbienne est en grande partie supprimée lorsque la température est inférieure à zéro. Cependant, à mesure que le climat ambiant se réchauffe, la décongélation du sol gelé et des micro-organismes accélère la décomposition de la matière organique en dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4) et protoxyde d'azote (N2O).
Les émissions directes de gaz à effet de serre (GES) ne sont responsables que d'une partie des pertes de carbone des sites de dégel. Une grande partie du carbone est en fait libérée par l'eau résultant de la fonte de la glace.
Une quantité considérable de carbone dégelé peut ainsi pénétrer dans les eaux intérieures environnantes avec des processus physiques, chimiques et biologiques complexes. Mais tous ces processus ne conduisent pas à la libération de carbone. Par exemple, l'enfouissement dans les sédiments, la préservation sélective et l'absorption microbienne peuvent retenir le carbone dans l'eau et réduire les émissions de GES. Le carbone dégelé peut également atteindre l'océan, où il peut persister pendant de longues périodes.
La végétation, solution pour éliminer le CO2 de l'atmosphère
Pourtant, une grande partie de ce carbone peut se retrouver dans l'atmosphère, augmentant les émissions directes des sols dégelés. Une grande partie de la matière organique qui pénètre dans les eaux intérieures (mers, lacs et rivières complètement fermés) est hautement biodégradable et la décomposition microbienne entraîne des émissions considérables de GES, en particulier le CH4, un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le CO2. Des mesures directes des émissions de méthane de quatre bassins fluviaux dans la zone de pergélisol du plateau tibétain - où les taux de fonte de pergélisol sont parmi les plus élevés au monde - montrent que les taux d'émission de CH4 des lacs de la région sont six fois plus élevés la moyenne mondiale des cours d'eau et des rivières.
Les sols compactés par la glace peuvent par ailleurs s'effondrer soudainement à mesure que le pergélisol se réchauffe, ce qui fait déborder les lacs et zones humides. Ce processus de dégivrage brutal peut libérer jusqu'à 190 % d'émissions de GES en plus par rapport au dégivrage progressif. Un modèle qui simule ce dégivrage brutal prédit que, bien que ce type de dégivrage ne se produise que dans moins de 20 % de la zone de pergélisol, il peut augmenter le rejet de carbone du pergélisol d'environ 50 %.
Mais il n'y pas que des mauvaises nouvelles... Le CO2 libéré par le pergélisol entraîne la croissance de la végétation dans la vaste zone de pergélisol, ce qui peut entraîner l'élimination de plus de CO2 de l'atmosphère. La régénération de la végétation après des glissements de terrain peut également compenser partiellement l'impact climatique, bien que l'effet estimé semble être limité. L'augmentation de la rétention de carbone par la végétation fournit un mécanisme important pour réduire la rétroaction permafrost-climat, mais son ampleur reste largement inconnue.