Pourquoi la grêle pourrait-elle devenir l'ennemi numéro un des assureurs ?
Le réchauffement climatique change la donne : des grêlons géants, plus rares mais destructeurs, pourraient faire exploser les coûts d’assurance selon une étude récente.
Les phénomènes météorologiques extrêmes liés au réchauffement climatique n’en finissent pas de poser de nouveaux défis, et la grêle se distingue désormais comme l’un des principaux périls en matière de coût et de dégâts. Contrairement aux idées reçues, il semble que la grêle pourrait frapper moins souvent, mais de façon beaucoup plus dévastatrice.
Selon une étude récente publiée dans Nature Climate and Atmospheric Science, ces changements de la dynamique des tempêtes mettent les assureurs face à des risques inédits, car les impacts financiers des tempêtes de grêle sont déjà parmi les plus élevés du monde des assurances.
Un climat qui transforme la grêle
Les récentes recherches climatiques ont montré que l'élévation des températures va non seulement réduire la fréquence des tempêtes de grêle, mais aussi augmenter la taille des grêlons. En effet, à mesure que l’atmosphère se réchauffe, elle devient plus chaude et humide, créant les conditions idéales pour la formation de grêlons plus volumineux.
Les chercheurs soulignent un point de bascule clé : dès que les grêlons atteignent environ 4 cm de diamètre, leur vitesse terminale augmente et ils traversent l’atmosphère sans fondre, malgré la chaleur ambiante.
En parallèle, les tempêtes de grêle de petite taille devraient se faire plus rares, car le réchauffement augmente la zone de l'atmosphère où les grêlons fondent, empêchant les plus petits de toucher le sol. Cette "dichotomie des tailles de grêlons", concept introduit par les chercheurs, pourrait transformer les tempêtes de grêle en événements occasionnels mais exceptionnellement dévastateurs.
Les coûts des dégâts de grêle en forte hausse ?
Les tempêtes de grêle sont devenues l’une des catastrophes climatiques les plus coûteuses aux États-Unis, surpassant souvent les dommages causés par les tornades. La grêle, à elle seule, représente environ 10 milliards de dollars de pertes annuelles rien que dans ce pays. Ce chiffre pourrait exploser sous l'effet des tempêtes futures, car la taille moyenne des grêlons est amenée à augmenter jusqu'à 75 % d’ici la fin du siècle en fonction des scénarios d’émissions de gaz à effet de serre.
Ces grêlons "géants" peuvent détruire des cultures, endommager des milliers de véhicules et bâtiments en quelques minutes. Ce constat alerte les experts en assurance, qui notent que l’ampleur des dégâts pourrait entraîner une explosion des coûts pour les compagnies dans les années à venir.
L'industrie de l'assurance, déjà fragilisée par des épisodes climatiques intenses comme les inondations et les incendies, voit un nouvel adversaire surgir avec cette grêle amplifiée. En effet, l'infrastructure des bâtiments actuels n'est pas conçue pour résister aux grêlons de cette ampleur, et même des régions autrefois peu touchées par la grêle pourraient être impactées.
Des défis financiers et stratégiques pour les assureurs
Face à des pertes financières croissantes, les compagnies d'assurance vont devoir revoir leurs modèles de tarification et de gestion des risques. Elles pourraient être amenées à augmenter les primes dans les zones exposées, ou même à limiter la couverture des dommages liés à la grêle.
Certains experts craignent que cette évolution ne rende l'assurance inaccessible pour les résidents de zones à haut risque. Ce phénomène de "prime climatique" toucherait alors directement les ménages et les entreprises des régions vulnérables.
En outre, les assureurs devront innover pour mieux anticiper les coûts des tempêtes à venir. L'utilisation de modèles météorologiques avancés et de simulations de changement climatique, comme celles utilisées dans cette étude, seront cruciales pour mieux évaluer les futurs dommages.
Par ailleurs, les stratégies de réduction des impacts, telles que l'amélioration des normes de construction et la mise en place de systèmes de prévention dans les zones à risque, seront des pistes de plus en plus explorées pour limiter l'ampleur des pertes.
Références : Gensini, V.A., Ashley, W.S., Michaelis, A.C. et al. Hailstone size dichotomy in a warming climate. npj Clim Atmos Sci 7, 185 (2024). https://doi.org/10.1038/s41612-024-00728-9