Les parasites : de simples nuisibles ou des protecteurs inattendus contre la pollution ?
Face à la menace croissante des produits chimiques sur la biodiversité, pourrait-il être envisageable que les parasites, souvent considérés comme des nuisibles, jouent en réalité un rôle de héros méconnus dans la lutte contre la pollution ?
La pollution chimique, insidieuse et omniprésente, pose un défi majeur à la biodiversité et à la santé des écosystèmes. Malgré cette urgence, l'évaluation des risques environnementaux est souvent critiquée pour son manque de prise en compte des interactions complexes entre les organismes et les produits chimiques.
Le prix de la prospérité industrielle
Avec une multitude de produits chimiques homologués pour une utilisation commerciale, la pression exercée sur notre environnement n'a cessé de croître depuis les années 1950.
Cette augmentation spectaculaire de la production et de l'utilisation de produits chimiques soulève des préoccupations quant à leurs effets sur la santé des organismes vivants et la stabilité des écosystèmes.
Une alliance inattendue
Habituellement, les parasites sont perçus comme des organismes nuisibles ou pathogènes qui vivent aux dépens d'autres organismes, souvent en leur causant des dommages. Ils sont fréquemment associés à des maladies chez les humains, les animaux ou les plantes, et sont l'objet de mesures de contrôle ou d'élimination à l’aide de produits chimiques.
Pourtant, dans la nature, les interactions entre les hôtes et les parasites sont le reflet d'une course évolutive perpétuelle. Les deux parties s'adaptent continuellement l'une à l'autre, dans une danse où la sélection naturelle façonne les stratégies de survie. L'introduction de substances chimiques dans cet équilibre délicat pourrait perturber ces interactions de manière inattendue.
Des recherches récentes suggèrent que les parasites pourraient jouer un rôle inattendu dans la lutte contre la pollution. Ces études ont montré que certains parasites ont la capacité d'accumuler les polluants ingérés par leur hôte, agissant comme des "pièges" pour ces substances toxiques. En séquestrant les polluants, ces parasites offrent une protection inattendue contre les effets nocifs des produits chimiques sur leurs hôtes.
Dans le cadre d'une recherche, les poissons parasités sont un exemple frappant : la présence de parasites dans leurs organismes leur confère une protection contre les effets toxiques, comme le stress oxydant. Les polluants sont ainsi capturés par les acanthocéphales, atténuant les dommages potentiels.
De même, les artémies, de petites crevettes, voient leur résistance à l'arsenic renforcée par la présence de parasites dans leur organisme. Cette adaptation s'inscrit dans la logique implacable de l'évolution : les parasites ont un intérêt direct à la survie de leur hôte lors d'une contamination, afin de compléter leur cycle de vie.
Cette découverte fascinante remet en question nos perceptions traditionnelles des parasites en tant que nuisibles et soulève la possibilité d'une nouvelle perspective sur leur rôle dans les écosystèmes.
Vers une coexistence équilibrée ?
La relation entre les parasites et la pollution n'est pas toujours aussi simple. La charge parasitaire peut varier considérablement d'un individu à l'autre, et des niveaux élevés de parasites peuvent également avoir des conséquences néfastes pour leurs hôtes. De plus, les effets des polluants sur les parasites eux-mêmes restent largement inconnus.
Les parasites, tout comme leurs hôtes, peuvent être vulnérables aux effets toxiques des produits chimiques, ce qui soulève des questions fondamentales sur la viabilité à long terme de cette interaction complexe. Comprendre les interactions entre les parasites et la pollution chimique est essentiel pour évaluer et atténuer les risques environnementaux dans un monde confronté à une pollution croissante.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour explorer la complexité de cette relation et pour déterminer dans quelle mesure les parasites peuvent être utilisés comme alliés dans la lutte contre la pollution. Une meilleure compréhension de ces interactions pourrait ouvrir la voie à de nouvelles stratégies de gestion environnementale, visant à protéger à la fois la biodiversité et la santé des écosystèmes.
Références :
- Sánchez, M. I., Pons, I., Martínez-Haro, M., Taggart, M. A., Lenormand, T., & Green, A. J. (2016). When Parasites Are Good for Health: Cestode Parasitism Increases Resistance to Arsenic in Brine Shrimps. PLOS Pathogens, 12(3), e1005459.https://doi.org/10.1371/journal.ppat.1005459
- Alliot, F., et al. (2021). Parasitism reduces oxidative stress of fish host experimentally exposed to PAHs. Ecotoxicology and Environmental Safety, 226, 112322. https://doi.org/10.1016/j.ecoenv.2021.112322