Comment retirer 9 milliards de tonnes de CO2 de l'atmosphère par an d'ici à 2050 ?

Pour respecter l'accord de Paris, le monde doit retirer 7 à 9 milliards de tonnes de CO2 de l'atmosphère chaque année d'ici à 2050. Les méthodes existantes et émergentes permettraient-elles d'atteindre cet objectif ?

Planter plus d'arbre réduit le CO2 dans l'atmosphère.
Planter plus d'arbre réduit le CO2 dans l'atmosphère.

La lutte contre le changement climatique est un défi colossal que l'humanité doit relever avec détermination et innovation.

Priorité absolue!

Si nous voulons limiter le réchauffement climatique à 1,5°C par rapport à l’ère préindustrielle, comme le stipule l’accord de Paris, nous devons non seulement réduire drastiquement nos émissions de CO2 mais aussi retirer de l’atmosphère entre 7 et 9 milliards de tonnes de CO2 par an d’ici à 2050. Selon un rapport coordonné par l’université d’Oxford, cette double approche est essentielle pour réussir à stabiliser le climat.

Malgré les avertissements répétés des scientifiques, les activités humaines ont encore généré près de 41 milliards de tonnes de CO2 en 2023. La réduction des émissions est la première étape cruciale, car chaque tonne de CO2 qui n'est pas émise est une tonne de moins à retirer de l'atmosphère.

Cela passe par la décarbonation de notre économie, le passage aux énergies renouvelables, l'amélioration de l'efficacité énergétique et la transformation de nos modes de vie et de production.

Elimination directe du carbone

En complément de la réduction des émissions, l'élimination directe du carbone (Carbon Dioxide Removal, CDR) joue un rôle essentielle. Le CDR se distingue des techniques de capture et de stockage du CO2 (CCUS) qui captent le CO2 au point d’émission. Les méthodes de CDR visent à retirer du CO2 déjà présent dans l’atmosphère et à le stocker durablement dans des réservoirs géologiques, terrestres ou océaniques, ou encore dans des produits.

Méthodes conventionnelles

  • Reforestation et agroforesterie

Les arbres sont des champions naturels de la capture de CO2. Par la photosynthèse, ils absorbent ce gaz et le stockent dans leurs racines, feuilles et troncs. La reforestation, l'agroforesterie et la gestion améliorée des forêts sont des méthodes éprouvées. Entre 2013 et 2022, la Chine, l'Union européenne, les États-Unis, le Brésil et la Russie ont été les leaders du reboisement.

Les zones humides comme les tourbières, qui absorbent efficacement le CO2, ainsi que les pratiques agricoles améliorées, telles que le semis direct et l'utilisation d'engrais verts, sont également des techniques précieuses.

  • Séquestration dans les produits à longue durée de vie

Le stockage du CO2 dans des produits comme le bois de construction contribue également à cette réduction.

Ces méthodes, bien que conventionnelles, offrent une base solide mais insuffisante pour atteindre l'objectif de 2050.

Eventail de méthodes innovantes

  • Biochar

Le biochar est une forme de charbon riche en carbone, produit par pyrolyse de biomasse. Cette méthode permet de stocker du carbone dans les sols tout en améliorant les rendements agricoles. La biomasse elle-même peut être enterrée, immergée ou brûlée pour générer de l'énergie, avec capture des émissions.

  • Bioénergie avec capture et stockage du carbone (BECCS)

Ce procédé combine la production d'énergie à partir de biomasse avec la capture et le stockage du CO2 résultant. Le CO2 capté est stocké dans des réservoirs géologiques, offrant ainsi une double solution énergétique et environnementale.

  • Techniques océaniques

Les océans, quant à eux, peuvent séquestrer du carbone via la fertilisation, l’alcalinisation ou la restauration d’écosystèmes. Ces méthodes sont encore en cours d'exploration.

  • Altération améliorée des roches

Cette technique consiste à broyer des roches capables d'extraire le CO2 de l'atmosphère en le fixant sous forme solide. Cette méthode, encore en phase de développement, pourrait offrir une solution durable à grande échelle.

  • Captage direct de CO2 dans l'air (DAC)

Le DAC utilise des absorbants, solvants ou membranes pour extraire le CO2 directement de l'air. Des start-ups comme Climeworks, en Islande, montrent la voie avec des usines capables de capter et de stocker sous terre 10 000 tonnes de CO2 par an.

Défis et opportunités

Actuellement, seulement 2 milliards de tonnes de CO2 par an sont retirées de l’atmosphère, principalement via des méthodes conventionnelles telles que la reforestation, l’agroforesterie et la gestion améliorée des forêts. Malgré les avancées scientifiques, les nouvelles méthodes ne retirent actuellement que 1,3 million de tonnes de CO2 par an, soit moins de 0,1 % du total mondial.

Encore une fois, il est donc crucial de ne pas se reposer uniquement sur le CDR pour atteindre les objectifs climatiques. La réduction des émissions reste incontournable.

Par ailleurs, le rapport de l'université d'Oxford souligne les risques sociaux, environnementaux et de durabilité liés au déploiement à grande échelle du CDR. Cependant, ces techniques, si elles sont bien planifiées, peuvent bénéficier à la fois aux populations et à la nature.

Le chemin est encore long. Atteindre l'objectif de retirer au moins 9 milliards de tonnes de CO2 par an d'ici 2050 est ambitieux mais nécessaire. Il faudrait accélérer le développement et le financement des nouvelles méthodes pour atteindre une échelle suffisante. Les gouvernements et les investisseurs doivent favoriser une gamme diversifiée de méthodes de CDR, accompagnée de solides protocoles d’évaluation, de suivi et de vérification.

La conjugaison de méthodes conventionnelles éprouvées et de nouvelles technologies prometteuses dessine une feuille de route susceptible de nous guider vers l'accomplissement des objectifs climatiques tout en réduisant significativement nos émissions.

À la une