Alerte : Les taux d'oxygène océanique sont semblables à ceux ayant joué un rôle majeur dans une extinction par le passé

D'après une récente étude, les taux d'oxygène observés actuellement dans nos océans sont similaires à ceux ayant engendré une extinction de masse il y a 200 millions d'années, et ceux-ci continuent de baisser.

Océans
Les taux d'oxygènes sont en baisse progressive dans nos océans, ce qui pourrait avoir de lourdes conséquences sur la biodiversité

Les niveaux d'oxygène dans nos océans sont en baisse depuis des décennies et atteignent aujourd’hui des niveaux similaires à ceux d'il y a environ 200 millions d'années, une désoxygénation des océans qui avait d'ailleurs participé à l'extinction de masse du Trias-Jurassique.

Les océans perdent de l'oxygène

Le réchauffement climatique anthropique n'engendre pas seulement une élévation de la température de l'air, mais également de celle des océans. Ce phénomène est aujourd'hui bien connu et est de plus en plus visible ces dernières années, notamment durant cette année 2023 qui a vu de nombreux records de températures battus au niveau de nos mers et océans.

Toutefois, cette élévation de la températures des mers engendre également une baisse des niveaux d'oxygène, qui est due à trois facteurs principaux. Tout d'abord, un phénomène physique qui fait qu'une eau chaude ne puisse pas contenir autant de gaz dissous qu'une eau plus froide, une eau réchauffée contiendra donc moins d'oxygène qu'une eau rafraîchie. Ce phénomène compte pour la moitié de la perte d'oxygène dans les 1000 premiers mètres des océans.

Ensuite, plus en profondeur, ce sont les mélanges avec les eaux de surface qui jouent sur les niveaux d'oxygènes. Or, la fonte des glaces et l'eau douce qu'elle apporte dans les océans font baisser le taux de mélange, ce qui engendre une stratification des océans, en d'autres termes certaines couches n’interagissent pas ou peu avec les eaux de surface et s'appauvrissent progressivement en oxygène.

Enfin, le long des côtes, le ruissellement des engrais fait proliférer certaines algues qui alimentent à leur tour de plus en plus de bactéries qui consomment beaucoup d'oxygène et appauvrissent le milieu dans lequel elles prolifèrent.

Ces 3 facteurs principaux, tous plus ou moins consécutifs à l'Homme, engendrent donc une désoxygénation progressive de nos océans. On estime que les niveaux d'oxygène dans ceux-ci ont baissé de plus de 2% entre 1960 et 2010, ce qui est énorme à l'échelle de la planète. De plus, les scientifiques estiment que ces niveaux d'oxygène pourraient encore baisser de 7% par rapport à 1960 d'ici la fin du siècle.

Quelles conséquences possibles ?

Cette situation est loin d'être bénéfique pour la biodiversité et il est aujourd'hui bien visible que les écosystèmes marins sont de plus en plus vulnérables à cette désoxygénation dans le monde entier. Mais jusqu'où cet impact sur la biodiversité marine peut-il aller ?

Des travaux publiés dans la revue Science Advances en 2022 ont déjà suggéré que la désoxygénation des océans avait joué un rôle majeur dans la première extinction de masse qu'a connu notre planète, l'extinction de l'Ordovicien-Silurien il y a environ 440 millions d'années qui avait engendré la disparition de 85% des espèces.

Plus récemment, des chercheurs du Trinity College de Dublin ont quant à eux mis en avant que les pics de désoxynégation dans les environnements marins peu profonds le long du continent européen coïncidaient directement avec des niveaux d'extinction accrus dans ces régions il y a environ 200 millions d'années lors de l'extinction Trias-Jurassique. De plus, ils ont observé que le phénomène s'était produit malgré une étendue plutôt limitée au niveau mondial de zones touchés par une désoxygénation importante et surtout sous des niveaux d'oxygène et des conditions assez similaires à ceux que connaissent aujourd'hui nos océans.

D'après ces mêmes scientifiques, le développement local de conditions anoxiques (dépourvues d'oxygène) et l’augmentation locale des taux d'extinction qui en résultent peuvent entraîner un effondrement mondial de l’écosystème et donc une extinction de masse comme celles qu'a connu la Terre il y a 440 et 200 millions d'années.

En d'autres termes, une réaction en chaîne peut s'engager lorsque certains secteurs océaniques connaissent une désoxygénation et une baisse importante de la biodiversité, même localisée. Même si les taux d'oxygène restent plus élevés ailleurs, les écosystèmes peuvent ensuite rapidement s’effondrer pour entraîner une extinction massive des espèces. Le phénomène s'est déjà produit dans le passé avec des taux d'oxygène océanique similaires à ceux que nous connaissons aujourd'hui.

Toutefois, il est aujourd'hui impossible d'assurer que ce type de réaction en chaîne va se produire dans un avenir plus ou moins proche. Si néanmoins les signes continuent de s'accumuler et tendent vers ce type d’événement, il est important de continuer à étudier les épisodes similaires passés pour mieux nous préparer à ce qui nous pourrait nous attendre dans ce contexte de réchauffement climatique anthropique.

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