Sécheresse : les derniers nomades du Maroc vont-ils disparaître ?
Les deux-tiers de la population des nomades dans le Sud du Maroc ont disparu en 10 ans. L'intensification des sécheresses menace leur mode de vie millénaire, une situation qui devrait empirer à l'horizon 2050. Jusqu'à entraîner leur disparition ?
Il ne resterait que 25 000 nomades dans le Sud du Maroc, selon le dernier recensement officiel datant de 2014, contre 70 000 en 2004. Une population diminuée des deux-tiers en 10 ans, mais sans doute encore surestimée, car certaines sources évoquent la présence de seulement 5 000 individus nomades ces dernières années dans cette région.
La raison de cette chute inquiétante ? Le réchauffement climatique, responsable de sécheresses de plus en plus importantes au Maroc, ce qui menace le mode de vie millénaire des nomades. La raréfaction de l'eau et des conditions climatiques de plus en plus difficiles d'ici 2050 pourraient les faire totalement disparaître…
Le nomadisme, marqueur du réchauffement climatique
Au Maroc, le nomadisme pastoral a plus de mille ans d'existence. Il repose sur la mobilité des individus au gré des saisons et des pâtures du bétail. Mais les populations nomades évoluent désormais dans des paysages de plus en plus arides et rocailleux, en déplaçant leurs tentes en laine noire, souvent autour de rivières, malheureusement de plus en plus à sec.
Cette année, le Maroc est en train de vivre sa pire sécheresse en 40 ans, et rien ne devrait s'améliorer selon les autorités locales, qui prévoient encore une baisse de la pluviométrie de 11% à l'horizon 2050. "Sans eau, on ne peut rien faire", témoignent certains nomades, s'estimant "épuisés".
"Si eux, qui vivent dans des conditions extrêmes, n'arrivent plus à résister à l'intensité du réchauffement, c'est que l'heure est grave", alerte l'anthropologue Ahmed Skounti. Un changement climatique qui perturbe leurs parcours de transhumance : voyageant traditionnellement entre les vallées montagneuses plus fraîches et la région rurale de Dra Tafilalt, ils choisissent désormais seulement les zones où l'eau est présente, pour que le bétail puisse survivre.
Un avenir incertain, voire condamné ?
La raréfaction des ressources en eau va sans doute "planter le dernier clou dans le cercueil des nomades", ose Ahmed Skounti. Certains nomades sont poussés à s'endetter pour nourrir leur bétail, alors que d'autres ont déjà choisi de se sédentariser, en s'installant en ville.
Le changement climatique n'est pas le seul responsable de la disparition progressive des nomades marocains. La privatisation des terres et de l'investissement agricole diminue la présence des pâturages, alors que les nomades arrivant en ville doivent souvent faire face à l'hostilité des habitants. L'avenir de ces populations semble à terme condamné, en tout cas au moins incertain.