Sécheresse, inflation : la choucroute alsacienne est-elle amenée à disparaître ?
Les producteurs alsaciens de choux à choucroute sont très inquiets : à cause de l'inflation et de la sécheresse, leur chiffre d'affaires est en forte baisse. Ils lancent un appel pour que la choucroute d'Alsace, plat iconique, ne disparaisse pas...
Réchauffement climatique et inflation vont-ils avoir la peau d'un des plats typiques de la gastronomie de notre pays, à savoir la choucroute d'Alsace ? C'est en tout cas le risque brandi par les producteurs de choux à choucroute, dont le chiffre d'affaires est en forte baisse en raison du contexte économique et météorologique.
Depuis 2010, des pertes chaque année !
Cet été, les choux à choucroute ont encore souffert de la chaleur. Philippe Buchmann, producteur alsacien, a confié à nos confrères du Parisien qu'il subissait depuis 2010 des pertes chaque année, à cause de la sécheresse et des canicules à répétition, et malgré l'irrigation des champs. Alors que la choucroute d'Alsace fait partie des dix plats préférés des Français, selon un sondage CSA de 2022, le président du syndicat des producteurs de choux à choucroute, David Jolly, estime que celle-ci pourrait devenir "un plat d'exception dans les décennies à venir".
La sécheresse et la chaleur pèsent en effet sur le rendement des exploitations, et sur le chiffre d'affaires, car les producteurs sont rémunérés au poids par les choucrouteries qui transforment le chou. Lorsqu'il fait plus de 30 degrés, le chou subit un stress hydrique et la taille du cœur du légume est alors plus petite... On comprend alors à quel point l'avenir de la choucroute est en jeu, avec des étés qui seront de plus en plus chauds d'ici la fin du siècle.
Par ailleurs, la hausse des températures depuis le début des années 2000 joue sur le coût de production des agriculteurs : 107,5 euros la tonne en juillet dernier, alors qu'il devrait être de 128 euros la tonne on prenant en compte l'inflation, selon une étude indépendante d'un cabinet comptable du Bas-Rhin. L'écart est énorme...
Vers un geste financier face à l'inflation ?
Les choucrouteries proposent actuellement aux producteurs un tarif à 120 euros la tonne de chou, bien insuffisant pour compenser la hausse des prix du gazole, des engrais, des pesticides ou même simplement de l'eau. C'est pour cela que les producteurs, inquiets pour l'avenir de leur profession, lancent cet appel à l'aide pour réclamer une meilleure rémunération de la part des transformateurs de choux.
Les négociations sont en cours, et un geste financier permettrait de sauver pendant quelques décennies ce plat emblématique d'Alsace et de sa capitale, Strasbourg. Les consommateurs sont appelés aussi, dans la mesure du possible, à faire un petit effort : il faudrait que chaque acheteur de choucroute dépense à chaque fois 4 centimes de plus pour que cela ait un effet sur la rémunération des producteurs. Si jamais les exploitations alsaciennes venaient à s'effondrer, les Français pourront toujours manger de la choucroute, mais à base de chou polonais ou allemand : bien moins traditionnel et peut-être moins appétissant, sans vouloir fâcher nos voisins...