Recyclage ou illusion ? Les vérités cachées sur nos déchets plastiques

Seuls 9 % des déchets plastiques mondiaux sont recyclés. Le reste finit en décharge, dans nos océans ou est incinéré. Et si le recyclage n’était qu’un mirage ?

Notre consommation de plastique a explosé, notamment pour des emballages à usage unique, alors même que ce matériau est parmi les plus difficiles à recycler.
Notre consommation de plastique a explosé, notamment pour des emballages à usage unique, alors même que ce matériau est parmi les plus difficiles à recycler.

Le plastique, ce matériau révolutionnaire inventé au début du XXe siècle, a transformé nos vies. Léger, résistant et bon marché, il s’est imposé dans chaque aspect de notre quotidien.

Le mythe du recyclage

Le recyclage du plastique est souvent perçu comme la réponse magique à la crise de la pollution. Pourtant, la réalité est bien différente. Selon l’OCDE, seulement 9 % des déchets plastiques dans le monde sont effectivement recyclés. Le reste ? 91 % finissent dans des décharges, sont incinérés ou, pire encore, polluent nos océans et nos sols.

Pourquoi un tel échec ? La réponse réside dans la conception même des plastiques.

La majorité d’entre eux ne sont pas conçus pour être réutilisés. Le PET (#1) (bouteilles d'eau, de boissons gazeuses, et d'autres emballages alimentaires) et le HDPE (#2) (bouteilles de lait, de produits de nettoyage ou encore les sacs plastiques) peuvent être recyclés.

Mais les autres plastiques posent problème : emballages complexes, incompatibilités entre matériaux, ou encore coûts élevés de tri. De plus, les plastiques vierges, souvent subventionnés par les industries fossiles, restent moins chers que le plastique recyclé.

Autrement dit, notre système actuel privilégie une production continue de plastiques neufs, au détriment de la réutilisation des matériaux existants.

Problème en constante expansion

La situation devient d’autant plus alarmante lorsque l’on observe la hausse de la production mondiale de plastique. En seulement deux décennies, celle-ci a plus que doublé, atteignant près d’un demi-milliard de tonnes par an. Résultat : chaque année, 81 % des plastiques mis en circulation deviennent des déchets dès leur première utilisation, souvent à cause des emballages à usage unique.

Traité par « Our World in Data », les chiffres ont été arrondis. Source OCDE 2023.
Traité par "Our World in Data", les chiffres ont été arrondis. Source OCDE 2023.

Mais l’impact ne s’arrête pas là. Les plastiques, en se dégradant, se fragmentent en micro et nanoplastiques. Invisibles à l’œil nu, ces particules contaminent nos sols, nos océans, et même l’air que nous respirons. Leur accumulation a des conséquences directes sur les écosystèmes et la santé humaine, en agissant comme des éponges à polluants chimiques.

Si rien n’est fait, les déchets plastiques dans les milieux aquatiques pourraient tripler d’ici 2060, aggravant une situation déjà critique.

Piège de "tout-recyclage"

L’idée selon laquelle nous pourrions recycler l’ensemble de nos plastiques est une illusion dangereuse. Comme le souligne Nathalie Gontard, experte en sciences des emballages, le PET des bouteilles est l’un des rares plastiques recyclables en boucle fermée (une nouvelle bouteille à partir d’une ancienne).

Mais même avec cette exception, cela représente seulement 2 % de la consommation mondiale de plastique !

Le recyclage, tel qu’il est pratiqué aujourd’hui, ne résout pas le problème, il le déplace. Il entretient une dépendance au plastique en nous faisant croire que nous pouvons consommer sans limite, tant que nous recyclons. En réalité, cette approche détourne l’attention de la vraie priorité : réduire notre production et notre consommation de plastique dès le départ.

Alors, quelles solutions possibles ?

Un changement radical de paradigme est nécessaire. Voici quelques pistes :

Réduction, responsabilisation, innovation

  • Réduire à la source : La prévention reste la meilleure solution pour lutter contre la pollution plastique. Il est essentiel de bannir les plastiques à usage unique et de limiter les emballages superflus afin de diminuer la production à la base.
  • Responsabiliser les industries : Les industries doivent être tenues responsables de la gestion de leurs déchets plastiques. Cela passe par l’imposition de réglementations strictes et par l’obligation pour les producteurs de prendre en charge la fin de vie de leurs produits.
  • Favoriser des matériaux alternatifs : Investir dans des matériaux durables et biodégradables est une priorité pour remplacer les plastiques conventionnels. Ces innovations offrent des solutions plus respectueuses de l’environnement tout en répondant aux besoins des consommateurs.

Vers un traité mondial contre la pollution plastique

La déclaration de l’ONU visant à “mettre fin à la pollution plastique” représente une opportunité historique, mais les négociations restent en cours. Malgré les objectifs initiaux fixés pour 2024, les discussions se heurtent à des divergences importantes, notamment sur la définition du plastique et les mesures de réduction à adopter.

Pour que ce traité soit véritablement efficace, il doit inclure des objectifs clairs de réduction des plastiques, dépasser la simple promotion du recyclage et surmonter les divergences entre les pays producteurs de plastique. Les négociations continueront en 2025 pour parvenir à un accord juridiquement contraignant.

Engagement citoyen

En tant que consommateurs, nous avons un rôle à jouer. Acheter en vrac, privilégier des alternatives réutilisables, ou refuser les produits sur-emballés sont autant d’actions qui font la différence. Mais ces efforts individuels doivent être soutenus par des politiques publiques ambitieuses et une révision globale de notre système économique.

Références de l'article :

Visual Capitalist. How Much of the World’s Plastic Waste Actually Gets Recycled? (Janvier 2025)

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