Pourquoi la Sardaigne, très ensoleillée et venteuse, se révolte-t-elle contre les énergies renouvelables ?

La Sardaigne est la région italienne qui émet le plus de gaz à effet de serre : pourtant, malgré un fort potentiel énergétique, l'île étant très venteuse et très ensoleillée, une résistance s'organise contre les projets d'énergies renouvelables. Pourquoi ?

Éoliennes Sardaigne
Les parcs éoliens sont de moins en moins respectés et acceptés sur l'île italienne de Sardaigne, ici près de la ville de Portoscuso.

L'île de Sardaigne, en Italie, fait figure d'eldorado pour les éoliennes et les panneaux solaires, en tant que territoire très venté et très ensoleillé. Une aubaine, alors que l'île est la région italienne qui émet le plus de gaz à effet de serre par habitant. Et pourtant, une résistance locale s'organise contre les projets d'implantation d'énergies renouvelables : comment l'expliquer ?

Un paysage "défiguré" ? Il l'est déjà...

Cet été, une éolienne sarde a failli s'effondrer après que ses boulons ont été dévissés par des vandales. Et ce n'est pas la seule infrastructure sur l'île à avoir été victime de sabotage... C'est un "rejet viscéral" des projets d'énergies renouvelables qu'expriment les habitants, et ce vandalisme vise à intimider les acteurs politiques locaux, qui décident de l'implantation de ces infrastructures.

Comme dans d'autres pays européens, en France ou au Royaume-Uni, les "résistants" contre ces énergies clament leur peur de voir le paysage être défiguré, et surtout de perdre leur identité locale. Paradoxal, alors que le paysage sarde est déjà altéré par le réchauffement climatique, avec les sécheresses et incendies estivaux, qui envoient parfois de la fumée jusqu'aux plages.

C'est en tout cas après la hausse du nombre de demandes de permis de construire pour ces projets qu'a été élue Alessandra Todde à la tête de la région, elle qui avait promis de mettre frein à "l'invasion" des renouvelables. Étonnant, quand on sait que 74% de l'énergie sarde était d'origine thermoélectrique en 2022, dont la plupart provient du charbon, que l'Italie cherche à éliminer...

Une exploitation et un surplus de production ?

L'autre argument des "anti" renouvelables est économique : ils soutiennent que les investisseurs exploitent les ressources naturelles de l'île. D'ailleurs, ils précisent que les structures prévues produiraient bien plus d'électricité que les besoins moyens de l'île : ils dénoncent le commerce qui en résulterait, nécessitant l'envoi du surplus d'électricité dans d'autres régions d'Italie.

Ce surplus d'énergie pourrait aussi être stocké en Sardaigne pour produire de l'hydrogène, utilisé ensuite dans des industries très difficiles à décarboner. En tout cas, un corridor électrique est déjà prévu pour relier l'île au reste du pays, il ouvrira en 2028...

Dans tous les cas, la Sardaigne, pour respecter les objectifs européens en matière de renouvelables, va forcément devoir construire d'immenses parcs éoliens et solaires. L'île dispose actuellement d'une capacité de production de 2,78 gigawatts en renouvelables : il en faudrait 6,2 de plus d'ici 2030 pour atteindre les objectifs de transition fixés par l'UE, soit un gigawatt par an !

Alors que la présidente de région a décrété un moratoire de 18 mois en juillet sur tous les nouveaux projets de renouvelables, les manifestations se poursuivent, contre ces projets et les grandes entreprises, mais aussi contre le gouvernement italien, Rome ayant contesté ce moratoire devant la Cour constitutionnelle. Les "anti" parlent même de "colonisation" de l'île par les multinationales... Ambiance !

Référence de l'article :

En Sardaigne, vent de révolte contre les énergies renouvelables - Geo

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