Les feux de forêts influencent la météo à des milliers de kilomètres !
Aussi étonnant que cela puisse paraître, les conséquences des incendies de forêts ne se limiteraient pas aux seules régions qui partent en fumée. Une étude américaine montre que la chaleur et les cendres qui s'en dégagent peuvent intensifier des orages à des milliers de kilomètres de distance.
Habitations détruites, évacuations, faune et flore dévastées, air irrespirable, fumées, pollution atmosphérique et même tornades de feu : les conséquences des incendies de forêt sont souvent terribles pour les régions concernées, comme on l'a vu encore cet été en France en Gironde.
Plus surprenant, une étude menée aux Etats-Unis, publiée par la revue Proceedings of the National Academy of Sciences, a montré que la chaleur et les cendres provenant de certains incendies de forêt pouvaient influencer la météo à 2500 km de distance !
Pluie et grêle plus abondantes lors d'orages violents
Les chercheurs, emmenés par le principal auteur de l'étude Jiwen Fan, se sont penchés sur un énorme incendie ayant touché la Californie à la mi-juillet 2018 (d'autres ont sévi depuis). Peu de temps après, à la fin du mois, de nombreux orages violents ont frappé pendant plusieurs jours le Wyoming et le Colorado (2500 km plus à l'Est), avec à la clé des pluies diluviennes, des grêlons géants et de puissantes rafales de vent.
Les scientifiques ont par ailleurs identifié depuis 2010 plusieurs grands épisodes orageux dans le Centre des Etats-Unis coïncidant avec des incendies de grande ampleur dans l'Ouest du pays.
Pour l'épisode de 2018, ils ont fait tourner un modèle de prévision météorologique en y ajoutant les effets de la chaleur et de la fumée émises par les feux, tout en simulant des phénomènes orageux sur une durée de plusieurs jours. L'équipe a également pris en compte l'effet des incendies locaux, pouvant toucher une région juste avant un orage.
D'après leurs résultats, "spectaculaires", la violence des orages serait directement corrélée à la présence d'incendies lointains, mais aussi d'incendies locaux. L'impact combiné des incendies lointains et locaux augmente les précipitations de 38% lors d'un orage. Quant aux chutes de grêle de plus de 5 centimètres, elles sont 34% plus fréquentes juste après un incendie, et encore plus après un incendie lointain.
Hautes pressions et particules en cause
Quelle est la raison de cette corrélation étonnante ? Les scientifiques expliquent tout d'abord que les feux très étendus génèrent, par l'émission de chaleur, de gaz et de particules, une zone de hautes pressions autour d'eux.
Cette zone de hautes pressions a amplifié les vents qui se dirigeaient vers l'Est (l'air circulant des hautes vers les basses pressions), vers la zone où les orages allaient se déclencher. Les vents, forts, ont emporté avec eux l'humidité présente sur leur chemin, un cocktail détonnant pour les orages.
Par ailleurs, les cendres et les particules provenant du nuage de fumée ont peu à peu flotté, dans le sens du vent, dans la même direction, jouant le rôle de noyau de condensation favorisant alors les chutes de pluie et de grêle. "La fumée n'est pas à l'origine de l'événement, mais elle l'intensifie", explique Pablo Saide, spécialiste de l'atmosphère.
A l'avenir, le réchauffement climatique devrait encore accroître l'intensité des feux de forêts, par ailleurs plus nombreux et possibles désormais quasiment toute l'année. Le risque que des périodes à risque d'incendies chevauchent des périodes à risque d'orages violents va donc augmenter : les conséquences n'en seront que plus dramatiques, avec fortes pluies et grêle destructrice plus fréquentes, parfois à 2500 km de l'incendie originel…