La COP29 misera-t-elle sur des solutions technologiques risquées pour l'humanité ?
La COP29 place de nouveau les technologies au centre des solutions pour atteindre les objectifs climatiques. Ce choix constitue-t-il un remède miracle à la hauteur des défis environnementaux mondiaux actuels, ou bien un piège évolutif en devenir ?
La Conférence des Parties sur le climat, mieux connue sous le nom de COP29, s’ouvrira le 11 novembre 2024 à Bakou, en Azerbaïdjan, avec pour ambition de dessiner l’avenir climatique mondial. Les discussions vont s’intensifier autour de la manière dont la transition énergétique sera financée.
Des milliards de dollars sont déjà investis dans des technologies censées stopper le réchauffement climatique, mais, paradoxalement, ces mêmes technologies pourraient aggraver les inégalités sociales et environnementales. La COP29 pourrait-elle être l’occasion de remettre en question cette logique de croissance à tout prix ?
Une arme à double tranchant
Le concept de techno-solutionnisme, c’est-à-dire l'idée que la technologie est la clé de la transition énergétique, a dominé les discussions lors des précédentes COPs, et la COP29 pourrait bien suivre cette tendance. Ce paradigme repose sur l’illusion qu'une technologie de production d’énergie propre et une capture de CO2 seront suffisantes pour résoudre les problèmes climatiques sans remettre en question notre mode de vie économique actuel.
Mais ces solutions posent un problème fondamental : elles risquent de ne pas tenir leurs promesses à long terme et pourraient même aggraver la situation, en enfermant l’humanité dans un cycle de dépendance à des innovations dont les conséquences sont encore incertaines.
Prenons l’exemple des voitures électriques, censées remplacer les véhicules thermiques. Si ces dernières ne rejettent pas de gaz à effet de serre, leur fabrication nécessite des matériaux rares dont l'extraction entraîne des destructions environnementales majeures, sans compter les impacts sociaux dans les pays producteurs.
Paradoxalement, au lieu de réduire notre empreinte écologique, cette solution pourrait intensifier les déséquilibres, ce qui est un véritable piège évolutif : une solution initialement perçue comme bénéfique, mais qui, dans un autre contexte, devient contre-productive.
L’exemple du plastique est également éclairant : autrefois, il semblait être la solution à tout, mais aujourd’hui, il pollue nos océans, menace notre santé et celle de la faune marine. Pareil pour l’utilisation intensive de pesticides ou d'engrais pour accroître les rendements agricoles qui entraîne désormais de graves impacts environnementaux.
Ainsi, en appliquant ce concept à notre société, il devient évident que notre dépendance excessive aux technologies et à la croissance économique continue pourrait nous conduire à un cul-de-sac environnemental.
Un peu d'équation pour mieux comprendre
Afin de cerner notre impact environnemental, on peut se tourner vers une formule proposée en 1972 par le biologiste Paul Ehrlich et le physicien John Holdren : I = P × A × T. Ici, I représente l'impact environnemental, P la population, A la consommation par habitant, et T la technologie utilisée.
Cette équation montre que notre impact dépend de plusieurs facteurs. Réduire simplement les émissions de CO2 via des technologies de captation, par exemple, ne prend pas en compte la croissance de la population ou l'augmentation constante de la consommation. De plus, certaines de ces technologies nécessitent souvent des ressources rares et entraînent des conséquences environnementales, comme l'extraction intensive de matériaux.
Tentation technologique sans danger ?
La stratégie privilégiée par les COP récentes repose essentiellement sur T, la technologie, dans l’équation IPAT, négligeant les autres leviers comme la sobriété dans la consommation (A) ou la stabilisation de la population (P). Cependant, cette approche technologique a ses limites.
En misant sur des technologies de captation du CO2 ou de nouvelles sources d’énergie, la COP29 risque d’encourager un modèle qui ne réduit pas suffisamment l’empreinte écologique globale. Pire, ces technologies peuvent devenir un nouveau piège évolutif, nous enfermant dans un modèle économique insoutenable, basé sur une consommation croissante de ressources naturelles.
Quelle alternative possible ?
Face à cette impasse, certaines voix s’élèvent pour proposer des solutions plus radicales, comme la "sobriété collective" recommandée par le GIEC dans son sixième rapport d'évaluation, ou encore la "prospérité sans croissance", une approche développée par l’économiste Tim Jackson et ses collègues. L’idée est de réduire notre consommation matérielle, de privilégier le bien-être plutôt que la quantité, et de réorienter les investissements vers des secteurs comme l’éducation, la santé et les infrastructures durables.
Le défi ici est de convaincre une population mondiale avide de croissance économique et de confort matériel, mais c'est peut-être là la seule solution viable si nous voulons éviter les effets dévastateurs de l’inaction.
La COP29 pourrait marquer un tournant décisif, où il ne s’agira plus seulement de discuter de financement de la transition énergétique, mais d’adopter une vision réellement transformative, fondée sur la coopération internationale et sur un modèle économique compatible avec la préservation de la planète.
Références : COP29 : l'espèce humaine prise au piège de son techno-solutionnisme ?