L'Antarctique devient "vert" : comment expliquer ce phénomène ?

Une étude a démontré que la péninsule antarctique verdissait de plus en plus rapidement ces dernières années, annonçant un véritable bouleversement des écosystèmes du "continent blanc".

Végétation
La végétation est de plus en plus présente sur certaines régions de l'Antarctique selon une récente étude

Selon une récente étude, les zones de végétation ont été multipliées par 14 en Antarctique entre 1986 et 2021, avec un taux de verdissement se montrant particulièrement élevé depuis 2016.

L'Antarctique verdit depuis plusieurs dizaines d'années

Des scientifiques se sont penchés sur environ 35 années d'images satellites de l'Antarctique, que l'ont surnomme « le continent blanc ». Ceux-ci ont récemment publié les conclusions de leur étude dans la revue Nature Geoscience et ont notamment mis en évidence que ce surnom était de moins en moins pertinent.

En effet, les données satellite ont montré que la péninsule antarctique, c'est à dire la pointe septentrionale du continent dépassant le cercle polaire, était de plus en plus couverte de végétation. Les zones de végétation sont passées de moins de 0,9km² sur ce secteur en 1986 à plus de 12km² en 2021, ce qui représente une multiplication par 14 environ en seulement 30 ans.

Le taux de verdissement de cette région de l'Antarctique s'est montré particulièrement élevé entre 2016 et 2021, atteignant 0,424km² par an, soit 34% de plus que la moyenne globale de ces 35 dernières années (0,317km² entre 1986 et 2021).

Selon les scientifiques, ce verdissement de plus en plus important de cette région pourrait être lié à la diminution de la couverture de glace de mer à cause du réchauffement climatique, à l'origine de conditions à la fois plus chaudes mais aussi plus humides sur ce secteur. En effet, la péninsule antarctique est l'un des secteurs qui se réchauffe le plus vite sur le continent. Les chercheurs tablent par exemple sur un réchauffement de +0,34°C par décennie sur cette région d'ici 2100, ce qui est bien supérieure à la moyenne mondiale.

Des conséquences néfastes pour les écosystèmes du secteur

On pourrait à première vue croire que ce regain de végétation de plus en plus important ces dernières années est une bonne nouvelle, pourtant il n'en est rien. Les chercheurs en charge de l'étude ont en effet estimé que cette végétation toujours plus présente sur la péninsule antarctique était majoritairement composée de mousses, car ces végétaux dits « pionniers » figurent généralement parmi les premiers à coloniser un milieu « nu ».

Or, les mousses contribuent à transformer peu à peu la roche mère en sol fertile, offrant donc des nutriments pour de nouvelles espèces végétales et même animales. Là encore, cela peut paraître bénéfique, mais ceci devrait au contraire favoriser un bouleversement des écosystèmes de la région dans un avenir relativement proche.

Effectivement, une des menaces pour ce continent qui se verdit au fil des années est de voir des espèces végétales se multiplier au-delà de leurs aires de dispersions naturelles mais surtout de voir arriver des espèces non-indigènes et invasives, espèces qui risquent fortement de prendre la place des espèces endémiques du secteur.

Une autre étude récente a par exemple démontré comment l'influence de l'Homme pourrait favoriser la venue de ces espèces invasives sur le continent, pourtant majoritairement délaissé par l'espèce humaine en raison des conditions y régnant. Celles-ci pourraient par exemple être importées sur place via des radeaux de plastique et s'implanter rapidement sur la région, les mousses et lichens de plus en plus présents rendant les sols plus fertiles et favorisant donc l'implantation de ces espèces non-indigènes.

Un véritable bouleversement des écosystèmes de l'Antarctique est donc en train de débuter. Si la péninsule antarctique est pour le moment la région la plus touchée, cette végétalisation croissante pourrait bien s'étendre dans les prochaines décennies à une plus large partie du continent, les températures se réchauffant toujours plus rapidement en liaison au changement climatique sur cette région du globe.

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