Île de Pâques : les autochtones sont-ils morts car ils avaient épuisés toutes les ressources de l'île ?
Les pascuans sont-ils morts à cause d'un suicide écologique, c'est-à-dire, par manque de ressources sur leur île du Pacifique ? Des analyses génétiques nous donnent des réponses.
Une toute nouvelle étude met fin à un mythe concernant les habitants de Rapa Nui (plus connue sous le nom de l'Île de Pâques). Selon le mythe, la population de cette île du Pacifique est à l'origine de son propre déclin. Les habitants auraient surexploités les ressources et finit par mourir du manque de nourriture entre autre.
Plus en détails : l'hypothèse sur la population est qu'un groupe de navigateurs polynésiens débarque sur l'île au début du XIIème siècle. Ils s'installent la communauté s'agrandit petit à petit. Naissent alors les moaï, les célèbres statues géantes. Les habitants vivent et prospèrent pendant plusieurs siècles en exploitant les sols, la faune et la flore de leur lieu de vie.
Sauf que... les scientifiques estiment que la communauté aurait atteint les 15 000 habitants à son apogée et que les ressources ont commencé à manquer ! Le manque de nourriture, la maladie, la guerre et même le cannibalisme auraient eu raison des rapanui. Ne survivent que quelques autochtones, découverts le 5 avril 1722 (jour de Pâques) par des Européens qui décident de rebaptiser l'île.
Ceci est la théorie la plus populaire élaborée au XIXème siècle et mis à mal par une étude basée sur des analyses de l'ADN d'ossements de 15 individus pascuans. Grâce à ces restes humains conservés au Museum national d'histoire naturelle et au Musée de l'Homme de Paris, les chercheurs peuvent enfin confirmé que le peuple rapanui a des origines sud-américaines.
Car, avant ces analyses génétiques, la communauté scientifique affirmait que les pascuans étaient exclusivement d'origine polynésienne. Or, plusieurs variétés de patates douces ont été retrouvées dans les îles du Pacifique, alors que ce tubercule n'est pas indigène aux îles polynésiennes. Les chercheurs suggèrent donc qu'il y a eu contact entre des peuples sud-américains et les polynésiens environ 1 ou 2 siècles avant la colonisation des européens sur l'Île de Pâques.
Les analyses ADN des ossements révèlent que, certes l'origine polynésienne des rapanui est majoritaire, mais il reste 6 à 11,4% de leur matériel génétique qui pourraient appartenir à des ancêtres sud-américains. Quel rapport avec la disparition des habitants de l'Île de Pâques ? L'hypothèse du suicide écologique (lié aux manques de ressources) est remis en question.
Grâce aux résultats d'analyses, les chercheurs ont estimé que ces 15 individus étudiés ont vécu entre 1600 et 1900, donc près de 200 ans après la colonisation européenne. Ils ont utilisé la "théorie de la coalescence, un modèle mathématique selon lequel le génome de chaque individu est constitué de segments de génomes hérités de ses ancêtres dont la longueur et le nombre peuvent indirectement nous donner un indice sur la taille d'une population donnée au fil du temps", révèle la coauteur de l'étude Évelyne Heyer.
"S'il y avait eu un effondrement de la population au moment d'un supposé écocide, les auteurs auraient observé un profil plus accentué (en nombre et en longueur) de ces segments du génome, indiquant que la plupart des ancêtres génétiques des Rapanui appartiendraient à une population de taille très réduite. (...) Or les analyses suggèrent de façon robuste le contraire", détaille Lluis Quintana-Murci, généticien.
En effet, la population était peu nombreuse au début du peuplement au XIIIème siècle. Et n'aurait fait que croître de façon régulière jusqu'au milieu du XIXème siècle. Les autochtones de cette île du Pacifique sud ne sont donc pas morts suite à un manque de ressources. Bien au contraire !
"Loin d'exploiter aveuglément leur environnement, les Rapanui ont su se maintenir et prospérer sur plusieurs siècles dans un environnement rude en mettant en œuvre des techniques agricoles innovantes telles que le « paillage à la pierre » pour remédier à la pauvreté des sols", rapporte Aymeric Hermann.
En réalité, la démographie pascuane a décliné suite à la transmissions de maladies importées par les occidentaux, puis en raison du travail forcé des années 1860 durant lesquels les rapanui ont souffert d'esclavage...
Source : LeFigaro