Environnement : quels sont les risques du tourisme spatial ?
Encore à ses débuts, le tourisme spatial risque de se multiplier dans les années à venir. Mais à l'heure où le changement climatique est une réalité, quels sont les risques pour l'environnement de ce nouveau tourisme dédié aux ultra-riches ?
Dimanche 11 juillet, Richard Branson, accompagné de trois autres passagers et deux pilotes, s'envolaient dans l'espace. Neuf jours plus tard, il était suivi de Jeff Bezos. Ils ont ainsi réalisé leur rêve en atteignant l'espace à 100 km d'altitude.
Richard Branson, patron de Virgin Galactic, envisage de mener ses premiers vols commerciaux pour l'année 2022, d'autant qu'il a déjà vendu plus de 600 billets. À terme, la société prévoit 400 vols par an. Mais si ce tourisme spatial venait à se multiplier, les scientifiques alertent sur l'impact environnemental de ces vols...
Des tonnes de carburant rejetées
Pour un simple vol entre deux pays, le coût polluant est déjà très élevé, alors imaginez si le tourisme dans l'espace venait à se développer. Ce projet ferait des ravages pour la planète. On estime comme l'explique Eloïse Marais, professeure agrégée de géographie physique à l'University College London : "Si les émission de carbone des fusées sont faibles par rapport à l'industrie aéronautique, elles augmentent de près de 5,6% par an".
Selon une étude dédiée à la pollution du tourisme spatial parue dans la revue The Conversation, les voyages stratosphériques du patron de Virgin Galactic équivalent à "4,5 tonnes de CO2 par passager". On est loin des 2 tonnes de CO2 annuelles que chaque personne devrait produire si l'on veut respecter l'Accord de Paris. Un vol de cette compagnie "équivaut à faire le tour de la Terre, seul dans une voiture moyenne" expliquent les trois chercheurs français.
Et ce n'est guère mieux pour les fusées Falcon de SpaceX puisqu'elles s'envolent grâce au kérosène et à l'oxygène liquide qui "émettra 1 150 tonnes de CO2, l'équivalent de 638 ans d'émission d'une voiture moyenne parcourant 15 000 km par an".
Des risques de changer le climat de la Terre
En plus de ces carburants, les scientifiques alertent sur le danger que représente la suie dégagée par ces vols. Elle se définit par un agrégat polluant de composés chimiques dont la majorité est du carbone. Dans leur recherche, l'équipe de scientifiques évoque un article de 2010 qui estime que "1 000 vols suborbitaux par an produiraient 600 tonnes de suie, qui, en restant à peu près dix ans en suspension dans la stratosphère, entre 30 et 50 kilomètres d’altitude".
Eloïse Marais explique que la majeure partie des composés chimiques lors des vols est relâchée, entre 12 et 50 km d'altitude, dans la stratosphère. Et ils peuvent y stagner plusieurs années. Or "dans la stratosphère, les oxydes d'azote et les produits chimiques formés par la décomposition de la vapeur d'eau convertissent l'ozone en oxygène, appauvrissant la couche d'ozone qui protège la vie sur Terre des rayons UV nocifs" déclare la professeure.
Idem pour les vols de la société Blue Origin qui rejettent beaucoup de vapeur d'eau en altitude. Les rejets commerciaux à 10 km d'altitude peuvent toujours être dispersés par les précipitations mais à 50 km d'altitude, la suie et les vapeurs d'eau en suspension dans la stratosphère peuvent grandement altérer le climat et notamment intervenir dans la formation et la multiplication des nuages dans l'atmosphère.