En Inde, le palais ancestral des maharadjas se transforme en hôtel de luxe
À Patiala, la demeure ancestrale des maharajas devient le premier hôtel palace du Pendjab. Situé au cœur de la ville, ce fort du XVIIIe siècle semble tout droit sorti des Mille et Une Nuits.

A peine franchies les grandes portes en bois à pointes métalliques, on pénètre dans la cour pavée cernée de bâtiments monumentaux et dans l'Histoire de l'Inde. La façade blanche de Ran Baas, jadis résidence des dames royales, brille comme les neiges de l'Himalaya grâce à la technique traditionnelle de plâtrage araish. Des gardes sikhs vêtus de sherwanis rose perle accueillent les hôtes dans un complexe qui rayonne à nouveau d'éclat après des années d'abandon.
Un retour aux sources du faste
À l'origine, Ran Baas était une maison d'hôtes royale occupant une aile de Qila Mubarak, un complexe où la famille royale vivait avec des dizaines de serviteurs et un trésor de diamants - il n'y en avait pas moins de 2930, par exemple, dans le collier fabriqué par Cartier pour le Maharaja Bhupinder Singh en 1928. À son apogée au début du XXe siècle, sous le règne de Bhupinder Singh - le premier Indien à posséder un jet privé -, il émanait de Qila Mubarak une grandeur et une démesure qui faisaient tourner les têtes et les langues de tous les rois du pays. Après l'indépendance, la propriété, comme tant d'autres palais en Inde, est lentement tombée en désuétude.
En 2014, le gouvernement du Pendjab lance un projet de restauration du fort, attendu depuis longtemps, sous la supervision d'Abha Narain Lambah, architecte de renom expert en conservation. Le projet prend un nouvel élan en 2021, lorsque la société Apeejay Surrendra Park Hotels Limited de Priya Paul est choisie pour faire revivre la riche histoire de Ran Baas.
Pour cette femme d'affaires visionnaire dont la famille a ses racines dans la ville voisine de Jalandhar, c'est comme un « retour aux sources ». « Nous avons pris possession des lieux en 2021, en pleine pandémie, se souvient Priya Paul. Deux éléments étaient essentiels pour moi. Tout d’abord, je voulais éviter de recréer le passé. Ensuite, je souhaitais inclure le plus possible de talents de la diaspora pendjabie. »
Une décoration puisant dans l'héritage culturel de Patiala
Le styliste Aseem Kapoor est choisi pour concevoir les uniformes élégants du personnel, tandis que les intérieurs sont décorés de sculptures exubérantes de Gurjeet Singh et d’éclairages audacieux signés Prateek Jain et Gautam Seth de Klove Studio, un studio de luminaire design installé à Delhi. L’équipe est dirigée par Deep Mohan Singh, lui-même un Sikh du Pendjab qui a travaillé dans les hôtels Oberoi.
Le hall d’entrée avec son grand escalier rappelle l'atmosphère de Versailles. Les lustres conçus par Klove Studio évoquent les paons qui se pavanent et les boucles d'oreilles pendantes des reines qui ont vécu ici. Les papiers peints sur mesure dessinés à la main illustrent des jardins indiens au clair de lune ou des paysages miniatures.
Dans un contraste saisissant, le bar Patiala apparaît comme une symphonie de velours bleu nuit et bordeaux, dont la profondeur est accentuée par une riche tapisserie inspirée du célèbre Sheesh Mahal, un ancien palais de Patilia devenu musée. On y retrouve l’espièglerie, l’esprit et le style inaltérable des princes indiens des années 1930, sur fond de musique bhangra et de chants soufis.

Une évasion hors du temps
Les aménagements intérieurs de Lambah ont donné naissance à 25 suites uniques en leur genre, déclinées en quatre palettes de couleurs. Certaines sont assorties au blanc de la façade de Ran Baas et présentent un sol en marbre du Rajasthan avec des incrustations de marbre noir. D'autres ont des touches de saphir et de corail. Enfin, des suites dévoilent une explosion de couleurs et d'exubérance modernistes. Certaines chambres situées en avant-scène sont parées de fresques anciennes. La plupart des chambres ont une superficie de plus de 1 000 m², avec des salles de bains spacieuses et des niches transformées en alcôves dotées de bureaux.

À la tombée de la nuit, la deuxième cour, en forme de jardin quadrilatéral parfait, offre un cadre féerique pour un dîner sous les arbres pluricentenaires au rythme mélancolique des chants soufis. « Il s’agit avant tout de laisser vagabonder notre imagination dans un monde de fantaisie, sans se laisser entraver par le temps », explique Priya Paul. C'est chose réussie.
Références
En Inde, le palais ancestral des maharajas ouvre ses propres suites, Cosmo Brockway, 7 mars 2025