Eaux minérales : Nestlé et Danone confrontés à la sécheresse. La production d'eau est-elle menacée ?
La recharge insuffisante des nappes phréatiques cet hiver a déjà un impact sur la production d'eau minérale. Le géant Nestlé suspend deux forages de son eau Hépar dans les Vosges, et Danone est sous pression dans le Puy-de-Dôme avec son eau Volvic.
La question de la sécheresse peut paraître paradoxale ces jours-ci, en particulier dans la moitié nord de la France où il pleut presque quotidiennement depuis le début du mois de mai. Ces précipitations profitent à la végétation et à la couche supérieure du sol, et non aux nappes phréatiques en profondeur.
Ces nappes demeurent à des niveaux insatisfaisants sur une grande partie du pays, avec des conséquences pour les industriels qui consomment beaucoup d'eau. C'est le cas des fabricants d'eaux minérales, qui sont priés de réduire leurs prélèvements dans les Vosges et le Puy-de-Dôme. Explications.
Deux forages suspendus dans les Vosges
Le département des Vosges n'est pour l'instant pas concerné par des mesures de restriction des usages de l'eau mais Nestlé a pris les devants. L'industriel, qui détient notamment les marques Vittel, Perrier et Hépar, a annoncé il y a quelques jours la suspension de deux forages liés à la production d'eau Hépar dans le massif vosgien.
Selon la marque, cette décision s'explique par "des conditions climatiques qui se détériorent, avec des évènements plus fréquents et intenses tels que des sécheresses régulières suivies de fortes pluies, qui affectent les conditions d'exploitation de certains forages sur son site des Vosges".
Les deux forages sont en effet considérés comme particulièrement sensibles aux aléas climatiques en raison de leur faible profondeur, ce qui affecte la disponibilité de la ressource en eau. Les quatre autres forages continuent d'être utilisés pour produire de l'eau Hépar, bien que les quantités disponibles soient limitées.
La durée de la suspension des forages n'a pas été précisée. Depuis de nombreuses années dans la région, des voix s'élèvent pour dénoncer les prélèvements dans ces nappes fragiles. "S'ils suspendent partiellement la production, c'est qu'il n'y a tout simplement pas assez d'eau", résume Bernard Schmitt, porte-parole du collectif Eau 88.
Une réduction de la production "symbolique"
Dans le Puy-de-Dôme, un autre industriel est confronté à un problème similaire : Danone, et sa marque Volvic, du nom d'une commune désormais concernée par un arrêté de restriction des usages de l'eau, signé le 2 mai dernier par le préfet du département.
Officiellement, cet arrêté ne contraint pas l'industriel à réduire sa production car Danone puise dans une nappe plus profonde que celle qui alimente la région en eau potable. Ce que dénoncent là encore certains collectifs locaux, comme France Nature Environnement Puy-de-Dôme 63 et Marsat Nature.
L'entreprise a annoncé réduire symboliquement de 5% ses autorisations de prélèvements, "en solidarité avec les acteurs du territoire". Il s'agit en fait d'une disposition établie dans son plan d'utilisation rationnelle de l'eau (PURE). Ce dispositif prévoit même une diminution de 10% en cas d'alerte sécheresse.
Pas sûr que cela suffise face à la réalité du pompage quotidien... La nappe du bassin de Volvic alimente des résurgences naturelles qui, depuis quelques années, voient leur débit se réduire : "les débits des résurgences sont passés de 120 l/s en janvier 2022 à 50 l/s en janvier 2023, un niveau jamais atteint à cette période de l'année. Ils étaient de 600 l/s en 1975 !", alertent les associations locales.