Éléphants d'Afrique : les femelles naissent sans défense !
Au Mozambique, de plus en plus de femelles éléphants évoluent et naissent sans défense suite à d'intenses braconnages liés à la guerre et qui ont décimé la population d'éléphant de 90% dans ce pays d'Afrique.
Pendant 15 ans, de 1977 à 1992, le Mozambique a connu une guerre civile qui a fait 900 000 morts et des millions de victimes dont des victimes collatérales : les éléphants. En effet, les deux camps adverses ont utilisé les éléphants et leurs défenses en ivoire pour financer pour l'achat d'armes. Ce braconnage a fait chuté la population de pachydermes, principalement du parc national de Gorongosa, de près de 90% !
Pour survivre, les éléphants subissent une évolution pour naître sans leurs défenses. Une équipe internationale détaille le mécanisme de cette mutation qui implique aussi la mort des progénitures mâles...
51% des femelles éléphants naissent sans défenses :
Des séquences vidéo historiques et les récentes données ont montré aux chercheurs de l'Université de Princeton, à l'origine de cette étude, que la proportion de femelles sans défenses est passée de 19 à 51% pendant la guerre civile qui a frappé le Mozambique. Alors que depuis la fin de la guerre, la proportion d'éléphants nés sans défenses a baissé de 51 à 30%. Cette mutation est due à la chasse à l'ivoire et au braconnage.
Car une autre analyse statistique a prouvé qu'il était extrêmement peu probable que cette mutation se produise en l'absence d'une pression. "Le braconnage existe depuis des siècles. Mais il a été particulièrement intense pendant la guerre civile. Et nous montrons qu'il est extrêmement improbable qu'un tel changement soit apparu sans une très forte sélection du phénotype", explique Robert Pringle, professeur de biologie évolutive à l’université de Princeton et auteur de l’étude.
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Le Mozambique n'est pas le seul pays à connaitre une évolution chez les pachydermes, c'est aussi le cas au Kenya, en Tanzanie et en Afrique du Sud. Au Sri Lanka, moins de 5% des éléphants d'Asie mâles ont encore leurs défenses. À noter tout de même une différence avec les éléphants d'Afrique mâles qui, malgré ce braconnage intensif, ont conservé leurs défenses.
Une mutation liée au chromosome X :
L'équipe n'a pas encore trouvé les changements génétiques précis qui causent cette mutation. Mais leur travail tend à montrer qu'elle s’effectue au niveau du chromosome X, dominant chez les femelles. Car elles en ont deux copies, donc si une des deux copies du chromosome X n'est pas mutée, la femelle éléphant restera tout de même en bonne santé. Mais pour les mâles - qui ne portent qu'un seul chromosome X - cette mutation est mortelle avant même la naissance pour ceux qui en héritent.
De fait, les mères éléphants nées sans ivoire donnent vie à deux-tiers de femelles et à seulement un tiers de mâles en moyenne, contre un ratio de 50/50 ordinairement observé. Au delà d'un déséquilibre inter-sexe, il s'agit aussi d'une conséquence très grave de l'activité humaine : "Les défenses sont essentiellement un couteau suisse pour les éléphants d'Afrique. Ils les utilisent pour enlever l'écorce des arbres, creuser des trous pour l'eau souterraine..." explique Shane Campbell-Staton l'un des auteurs de l'étude. Mais s'ils n'ont plus ces outils, que se passe-t-il ?
Effet boule de neige. De nombreux animaux dépendent indirectement des éléphants à défenses notamment pour obtenir l'eau dans les trous creusés avec les défenses des pachydermes : "C'est ce qui maintient la biodiversité. Il y a toutes ces conséquences en cascade qui peuvent résulter de nos actions qui sont assez surprenantes" continue Shane Campbell-Staton.