Comment expliquer les crues historiques en Bretagne ? À quand la décrue ?
Les crues se poursuivent et s'étendent en aval sur les cours d'eau du Nord-Ouest du pays en vigilance orange ou rouge. La Bretagne, et notamment le bassin rennais, sont particulièrement touchés. Comment expliquer cette situation historique ? En voit-on le bout ?
Nous sommes sans doute en train de vivre les deux dernières journées avec des pluies notables sur le pays, avant le retour de l'anticyclone de manière durable. En attendant, les crues se poursuivent malheureusement dans le Nord-Ouest, avec toujours une vigilance rouge activée sur l'Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique et le Morbihan, pour la crue exceptionnelle de la Vilaine et de la Seiche.
La Somme, l'Oise, la Seine-Maritime, l'Eure et la Sarthe sont également en vigilance orange crues-inondations, pour des débordements importants sur l'Oust, le Meu, la Vilaine amont, la Somme, la Sarthe aval et l'Epte. Mais c'est du côté du bassin rennais et notamment de Redon que la situation est la plus critique. Comment l'expliquer ? Quand faut-il espérer le pic de crue puis la décrue ?
Janvier 2025 historique à Rennes
Ces crues s'expliquent d'abord par le contexte pluviométrique en France (et donc aussi en Bretagne) depuis octobre 2023, où pratiquement tous les mois ont été excédentaires en pluies. 2024 a d'ailleurs été la 7e année la plus pluvieuse de notre histoire récente, et avec tous ces excédents de pluie, les sols sont restés très humides, parfois à des niveaux exceptionnels en ce mois de janvier.
Or, des sols gorgés d'eau, un peu comme le serait une éponge trop humide, ne parviennent plus à laisser passer l'eau : celle-ci ne s'infiltre plus, d'où une amplification du risque d'inondations à chaque épisode pluvieux important. D'ailleurs, après une parenthèse plus sèche début janvier, il a de nouveau beaucoup plu depuis le 20 janvier, notamment sur le quart Nord-Ouest du pays.
Avant le passage des dépressions Herminia et Ivo qui ont encore aggravé les choses, l'Ille-et-Vilaine avait déjà connu 7 journées en janvier avec un cumul de pluie supérieur à 10mm, ce qui n'était arrivé que deux fois depuis 1959 (en janvier 1995 et janvier 2001). Entre le 21 et le 25 janvier, la ville de Rennes a reçu l'équivalent d'un mois de pluie.
Janvier 2025 est d'ailleurs à Rennes non seulement le mois de janvier le plus arrosé depuis 1945 (battant les 169,6mm de pluie de janvier 1995), mais avec près de 200mm de pluie à cette heure, il devient aussi le mois le plus arrosé tous mois confondus, battant octobre 1966 et ses 193,6mm de précipitations. Cela confirme le caractère historique du phénomène en cours.
Une décrue très lente dès ce week-end ?
Ces pluies exceptionnelles arrivent dans une période de l'année où la végétation dort toujours et ne prélève donc pas l'eau de pluie tombée. De plus, les nappes phréatiques sont désormais très bien remplies, et avec des vents d'Ouest ou Sud-Ouest dominants, l'écoulement des cours d'eau vers l'océan est freiné, ce qui aggrave encore les inondations.
En ce jeudi midi, c'est toujours du côté de Redon que la situation est la plus inquiétante, notamment parce que la ville est située à la confluence de nombreuses rivières en crue (la Vilaine, l'Oust, et tant d'autres non suivies par Vigicrues). A Guéméné-Penfao, à 20km de Redon, janvier 2025 a enregistré 226mm de pluie, plus de deux fois la normale !
Le pic de crue à Redon n'est donc toujours pas atteint, et selon les dernières prévisions, le niveau de la Vilaine devrait continuer à monter jusqu'à demain au moins, voire samedi, peut-être jusqu'au niveau historique de 1936 (5m46). La décrue devrait ensuite s'amorcer, mais de manière très lente, dès la fin de ce week-end, grâce au retour du temps sec et anticyclonique.