Comment expliquer la "canicule marine" en cours dans les eaux françaises ?
Les températures de l'eau en mer Méditerranée et dans l'océan Atlantique-nord ont été largement supérieures à la normale ces dernières semaines, dignes d'un mois d'août. Quelles sont les conséquences de cette "canicule marine" et comment l'expliquer ?
Depuis ces dernières semaines, la mer Méditerranée et l'océan Atlantique affichent une température de l'eau anormalement élevée, au point que l'on parle de "canicule marine". Ces événements, exacerbés par le réchauffement climatique et qui se reproduisent de plus en plus souvent, soulèvent de sérieuses préoccupations quant à leurs conséquences sur les écosystèmes marins.
Un phénomène observé dans toute l'Europe
Les "canicules marines" sont des périodes où la température de la mer dépasse durant cinq jours les 10 % des températures les plus élevées enregistrées au cours des trente dernières années, dans une zone donnée de l'océan.
Plusieurs facteurs peuvent contribuer à l'apparition de canicules marines, tels que le phénomène El Niño (dans l'océan Pacifique), les modifications des courants marins, l'affaiblissement des vents qui favorisent le réchauffement des eaux de surface, l'augmentation de la température de l'air et la diminution de la couverture nuageuse. Durant une grande partie du mois de juin en Europe, des conditions stables et ensoleillées ont persisté.
Ces dernières semaines, dans l'océan Atlantique, en particulier autour de l'Irlande et du Royaume-Uni, les températures à la surface de l'océan ont dépassé les normales saisonnières de manière significative, atteignant par endroits jusqu'à 5 °C de plus que la moyenne enregistrée entre 1971 à 2000. Cet évènement n'a pas de précédent connu au mois de juin dans cette zone.
La mer Méditerranée a connu une situation similaire en juin, particulièrement sur l'ouest du bassin. On observait en moyenne des températures de l'eau 2 à 3°C supérieures à la normale ces derniers jours, avec des valeurs proches de 25°C, en particulier vers la Corse.
De lourdes conséquences pour les écosystèmes
Selon le GIEC, la durée des canicules marines a augmenté de 54 % au cours du siècle passé. Les scientifiques estiment que la fréquence de ces phénomènes pourrait être multipliée par 50 si les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter, et par 20 si elles déclinent immédiatement pour être nulles d’ici à 2100.
Les canicules marines ont de lourdes conséquences pour les écosystèmes marins. Elles entraînent une mortalité massive des espèces, y compris les poissons, les coraux, les algues, les éponges et les mollusques.Les écosystèmes marins sont ainsi déséquilibrés et perdent ainsi une partie de leur biodiversité.
Ces vagues de chaleur fragilisent également les habitats marins, tels que les récifs coralliens et les herbiers. Les coraux sont sensibles aux variations de température et peuvent blanchir ou mourir en cas de stress thermique prolongé. Les herbiers marins, qui abritent de nombreuses espèces marines, peuvent également être affectés, ce qui entraîne la perte d'habitats essentiels pour de nombreux organismes.
La chaîne alimentaire est perturbée, des espèces invasives s'installent et des altérations des processus biogéochimiques (libération de nutriments et de carbone organique dans l'eau) sont observés. Enfin, des eaux plus chaudes peuvent également proliférer davantage de bactéries et de phytoplanctons toxiques...