Alerte : certaines forêts rejettent désormais plus de CO2 qu'elles n'en absorbent !
Que se passe-t-il dans nos forêts ? Alors qu'elles sont le premier puits de carbone de notre pays, leur capacité à absorber le CO2 a été divisée par deux en dix ans, à cause du changement climatique, mais aussi de la gestion humaine des forêts. Certaines d'entre elles sont même devenues émettrices de dioxyde de carbone !
Premier puits de carbone du pays, devant les prairies, la forêt française a vu sa capacité à absorber le CO2 divisée par deux en dix ans. Dans les Hauts-de-France, le Grand-Est et la Corse, les forêts sont même devenues émettrices de CO2 ! La fonction essentielle des arbres qui, grâce à la photosynthèse, stockent le dioxyde de carbone émis par les activités humaines, est-elle réellement menacée ? Qui sont les responsables de ce fléau qui met en péril l'objectif de neutralité carbone en 2050 ?
Sécheresse et fragilité
En 2021, les forêts françaises n'ont absorbé que 31,2 millions de tonnes de CO2, soit 7,5% des émissions du pays : c'est deux fois moins qu'il y a dix ans, selon un rapport publié le 5 juin dernier par le Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (Citepa). En compilant ces données avec d'autres travaux de chercheurs et des observations satellitaires, une carte établie par nos confrères du journal Le Monde révèle même que les forêts des Hauts-de-France, du Grand-Est et de la Corse émettent plus de CO2 qu'elles n'en absorbent...
Ce constat très inquiétant s'explique facilement : sécheresses, incendies et tempêtes en sont les premiers responsables, et la hausse de leur fréquence dans les prochaines décennies à cause du réchauffement climatique n'augure rien de bon. Ainsi, la mortalité des arbres a augmenté de 54% en 10 ans, alors que dans le même temps, la superficie des forêts grapille 0,7% chaque année depuis 1985.
Dans les Hauts-de-France, si les causes de l'émission de CO2 par les forêts sont "multifactorielles", les caractéristiques des massifs forestiers jouent beaucoup : 75% sont privés et souvent très petits, plus fragmentés donc plus fragiles et plus sensibles aux changements de températures. Une fragilité facilement observable en temps de sécheresse : ainsi, l'ONF estime que depuis 2018 et des manques d'eau à répétition, 300.000 hectares de forêts en France ont subi des dépérissements importants, avec parfois des taux de mortalité énormes, comme dans l'Oise, où près de 30% de la forêt a dépéri.
Stop aux coupes !
Dans nos forêts, le manque d'eau peut aussi être lié à une tendance : celle de vouloir trop couper ! Prélever du bois, c'est "moins de végétation, moins de biomasse, moins de transpiration et donc moins d'eau qui retourne dans les sols", selon le chercheur Jonathan Lenoir. Par ailleurs, couper les plus vieux arbres n'est pas non plus une bonne idée : ceux-ci peuvent encore stocker autant de CO2 que les plus jeunes, et pendant plusieurs siècles ! Et ils sont par ailleurs bien plus résistants à la sécheresse...
Choisir ce que l'on coupe, cela signifie une meilleure gestion humaine de la forêt. Et cela ne veut pas dire non plus planter des arbres n'importe où : il faut s'assurer de leur bonne implantation et assurer leur entretien. En effet, un arbre peu protégé sera plus sensible aux insectes et aux maladies, or un arbre mort émet du CO2 ! Prendre soin des sols est aussi essentiel : la mécanisation des forêts avec ses machines à outrance a tendance à tasser les sols, ce qui là encore diminue les capacités d'absorption de CO2. Il est encore temps d'agir, pour que nos forêts restent fidèles à leur réputation de premier puits de carbone...